L'histoire de l'Amsterdam Pipe Museum

Général

En 1994, la décision radicale a été prise de s'installer à Amsterdam, car c'était le meilleur endroit pour un musée spécialisé dans les pipes. Un bâtiment approprié a été trouvé sur l'un des principaux canaux du centre. Après plus de trois cents ans, la maison du canal avait besoin d'une restauration complète. Le résultat a été étonnant : l'intérieur a retrouvé son allure et son histoire. Le marbre du couloir a été réparé, les stucs des murs et des plafonds ont été méticuleusement restaurés, un plafond à poutres d'origine a été restauré en rouge sang de bœuf, des parquets anciens en chêne ont été posés à nouveau.

Ces travaux ont permis de créer une double attraction : une maison ouverte sur le canal avec une collection unique, réunie dans un véritable cabinet de collectionneurs. Les meubles choisis avec goût, tels que les armoires, le lustre vénitien et l'horloge à long boîtier, rehaussent l'atmosphère de la maison. Le charme du musée réside également dans l'accueil particulier réservé à chaque visiteur, qui est guidé personnellement. L'objectif de la collection a depuis été étendu aux pipes de tous matériaux, y compris l'écume de mer et le bois, complétés par des exemples ethnographiques.

Pour le fonctionnement du Pijpenkabinet, le fait que le sous-sol puisse être utilisé comme magasin, initialement sous le nom de Smokiana pipeshop, a été un grand progrès. Avec sa propre entrée et une vitrine sur la rue, la boutique pouvait fonctionner séparément et même avoir des heures d'ouverture plus longues que celles du musée. Grâce à cette forme d'entreprenariat culturel, le Pijpenkabinet était très en avance sur la plupart des musées, si bien que le monde des musées a parfois regardé la fonction de boutique d'un mauvais œil et avec une certaine méfiance. Pourtant, la formule s'est avérée la bonne, notamment grâce à l'ajout d'un assortiment de pipes à fumer modernes. Non seulement cela a provoqué un afflux de fumeurs de pipes, mais il s'est même avéré que cela répondait de plus en plus à un besoin, la pipe en bruyère ayant disparu des bureaux de tabac généraux.

Exposition à Amsterdam

Tout comme l'exposition permanente de la collection dans la salle des Régents à Leyde, la collection de pipes d'Amsterdam a également été intégrée dans un intérieur historique. Cependant, l'espace d'exposition est beaucoup plus grand, avec un nombre multiplié de vitrines. Cela était nécessaire pour pouvoir présenter la collection, qui s'est fortement développée, dans toute sa largeur. Le choix s'est porté sur une exposition thématique plutôt que sur une exposition éducative, car le bâtiment était trop petit pour cela. Grâce à une présentation intelligente, plus de deux mille objets ont pu être placés dans l'exposition permanente.

Un double mur vitrine a été conçu pour le hall principal, avec une finition en vert céladon. Chacune des dix grandes vitrines présente un aspect important ou une aire culturelle de l’art de la pipe. Les thèmes abordés sont l'Amérique précolombienne, la culture hollandaise de fumer la pipe depuis 1600, y compris les accessoires du riche XVIIIe siècle, les premières pipes en écume, les pipes figuratives en porcelaine, les pipes à eau et les pipes cérémonielles du Cameroun. Au centre de la salle, une table avec douze chaises en cuir peut accueillir des groupes de visiteurs sur rendez-vous. Les personnes intéressées peuvent se faire expliquer la collection tout en dégustant une tasse de café ou de thé. Les clubs de fumeurs de pipes utilisent également cette installation et peuvent allumer leurs pipes.

Dans la salle avant, un beau cabinet du XVIIIe siècle contient les curiosités les plus étonnantes dans le domaine du tabagisme : des pipes artisanales fabriquées en verre, en corne de cerf, en coquillage, en agate, pour ne citer que quelques matériaux inattendus. Plus d'une centaine de têtes de pipes en porcelaine allemande peintes à la main se trouvent également dans cette pièce donnant sur le canal. Des vitrines encastrées dans le couloir et sur le palier présentent les sous-collections de pipes à opium chinoises et de pipes à tabac d'Extrême-Orient. Le jardin d'hiver avec vue sur la cour est réservé aux pipes faites à la main au Cameroun, au Ghana et en Côte d'Ivoire. Dans une salle séparée de l'annexe secrète, quatre vitrines sont consacrées à la pipe en terre, qu'il s'agisse de pièces archéologiques ou de pipes du XIXe siècle au design divertissant. L'atmosphère de spécialisation de Leyde revit dans cette salle.

Collectionner à Amsterdam

Au cours de la période précédente, la collection était déjà internationale, mais toujours axée sur la céramique. Depuis le déménagement à Amsterdam en 1995, le domaine de la collection s'est élargi : pipes à fumer de toutes les cultures, fabriquées dans n'importe quel matériau. Le rattrapage dans ce domaine a été possible parce que de nombreuses collections privées et même des collections de musées ont été mises sur le marché au cours de cette période. Lorsque des particuliers proposent une collection, ils souhaitent se débarrasser de tout en une seule vente. Il s'ensuit un processus de sélection pour le Pijpenkabinet, qui aboutit parfois à ne conserver qu'un pourcentage limité pour le musée, ce qui est bien sûr le plus intéressant.

Lors des ventes aux enchères, un choix doit être fait rapidement sur place, d'abord en fonction de la qualité et de la valeur culturelle, puis en fonction du prix. Le conservateur Don Duco est en mesure d'évaluer rapidement ces facteurs grâce à sa solide expertise et à sa connaissance du marché. Au cours de la période 2000-2005 en particulier, de nombreuses ventes aux enchères ont eu lieu, ce qui a permis au musée d'Amsterdam d'acheter beaucoup de matériel ; dans plusieurs cas, des pipes qui n'avaient pas été changé de propriétaire depuis un demi-siècle ou plus.

Pour le Pijpenkabinet, la provenance ou le pedigree fait partie de la valeur culturelle d'un objet. Des collections célèbres ont ainsi été représentées dans le musée, notamment les collections d'entreprise de Niemeijer, Dunhill, Wills & Co, Austria Tabak et de la Seita. En outre, des parties de collections privées qui n'ont jamais cherché à se faire connaître mais qui étaient connues dans les cercles d'experts. L'article sur les collectionneurs et leur passion dans ce site web en dit plus sur les sources auxquelles la collection du Pijpenkabinet a puisé.

En raison de la fermeture d'innombrables collections de musées, y compris aux Pays-Bas (Utrecht, Kampen, Gouda, Groningen), il semble que le Pijpenkabinet soit le seul gardien du patrimoine de la pipe. En même temps, on peut conclure que la qualité de la collection du Pijpenkabinet s'est tellement améliorée qu'elle a atteint le sommet à l'échelle européenne. La combinaison de la collection et de la documentation est tout à fait unique dans le domaine de la pipe et du tabac. Les autres musées étaient et sont toujours destinés à la visite du public, mais ne font pas de recherche et n'ont souvent même pas d'inventaire.

La recherche à Amsterdam

Logiquement, l'élargissement de la collection a également élargi la recherche. Depuis 2000, le Pijpenkabinet a principalement exprimé sa nouvelle expertise dans des articles sur le web. Par exemple, des publications sont parues sur une série de sujets tels que les pipes Ashanti, l'iconographie de l'emballage du tabac, les pipes à système, les salaires dans l'industrie de la pipe, les pipes en épi et la pipe en écume.

La publication du livre Opium & opiumschuiven, un ouvrage de référence résultant d'une étude renouvelée de sa propre collection, a constitué un grand pas en dehors du domaine de recherche traditionnel. Les bases de la collection d'opium ont été jetées en 1994 lors d'un congé sabbatique de Don Duco en Asie du Sud-Est. L'ajout à la bibliothèque du musée de dizaines de livres provenant de la célèbre collection de Boudewijn Büch a donné un élan supplémentaire aux sources utilisées.

La recherche archéologique a été considérablement stimulée par la Convention de Malte, qui a rendu la recherche et la publication de fouilles archéologiques obligatoires. Le nombre de fouilles augmente de manière explosive, tout comme les besoins en matière de recherche de matériaux spécialisés. Le Pijpenkabinet a été confronté à des milliers de pipes, et notre expertise ne s'est pas limitée à l'identification de l'âge et de l'origine, mais a surtout consisté en une interprétation fondée de l'utilisation et de la position sociale de la pipe à l'époque et dans la couche sociale concernées.
Les recherches traditionnelles sur la pipe en terre se sont poursuivies comme à l'accoutumée et ont abouti à la publication d'un ouvrage novateur sur l'évolution de la conception de la pipe en terre en Europe au XIXe siècle, intitulé Century of Change, the European clay pipe, its final flourish and ultimate fall (Le siècle du changement, la pipe en terre européenne, son essor final et sa chute finale). Le projet pluriannuel sur l'histoire de la fabrique de pipes et de poteries Goedewaagen a été achevé en trois parties : l'histoire de la famille, l'industrie de la pipe et l'histoire de l'entreprise et des produits de poterie. Cette dernière partie a permis d'établir le nom de Duco dans le cercle des experts en céramique.

Enfin, le livre sur les marques de pipes, intitulé Marques et ordonnances des pipiers de Gouda, a été renouvelé et considérablement élargi. Ce livre volumineux est le couronnement du travail de Duco, un ouvrage de référence qui n'a pu être réalisé qu'après plus de vingt ans de recherches supplémentaires, en partie grâce à la numérisation des énormes bases de données de fabricants et de marques qui avaient été collectées et traitées depuis 1969.

Activités publiques

Au 21e siècle, le site web s'est avéré être de loin le service public le plus important. Créé en 2000, le site du Pijpenkabinet est devenu en dix ans une vaste source d'informations avec des centaines de pages et plus de 2 000 illustrations. Comme le web mondial, le site a toujours été entièrement bilingue. Toutefois, les informations sont restées relativement plates, en ce sens qu'il s'agissait d'une série de brochures numériques, d'articles et d'images accompagnées d'un chat. L'augmentation du nombre de visiteurs à plus de 50 000 par an a prouvé le besoin d'informations sur la culture du tabagisme à la pipe. La lettre d'information électronique du Pijpenkabinet a permis de communiquer avec le groupe cible pour obtenir son soutien.

En 2004, le Netherlands Open Air Museum d'Arnhem s'est montré intéressé par l'aménagement d'une salle avec des pipes à fumer pour une période de dix ans. Au milieu de deux cents pipes spéciales provenant du musée d'Amsterdam, le visiteur pouvait s'asseoir confortablement et regarder un film dans lequel le conservateur racontait l'histoire remarquable de certaines pièces spéciales. Cette initiative a permis de créer un avant-poste à l'autre bout du pays.

L'initiative du Pijpenkabinet de publier une brochure commune avec tous les musées de la pipe et du tabac des Pays-Bas a été accueillie avec enthousiasme. Il s'agissait de la première forme de collaboration simple dans laquelle les visites des collections néerlandaises de pipes et de tabac étaient stimulées par la recommandation des pairs. Quelques années plus tard, la fermeture définitive de trois des neuf musées a dilué l'impact de cette initiative. Il s'agissait d'un phénomène symptomatique, également reconnaissable à l'étranger : la culture du tabac n'était plus demandée.

Les visites de musées dans la phase d'Amsterdam sont restées, contre toute attente, en deçà des attentes. Les visites de groupes cibles néerlandais, des clubs de fumeurs aux femmes au foyer, ont été importantes, en plus des touristes étrangers motivés. Cependant, à mesure que le débat sur l'interdiction de fumer devenait plus intense et moins subtil, les visites de musées ont diminué. Le Pijpenkabinet a réagi en ne cherchant temporairement pas à faire de la publicité et en travaillant en coulisses sur la collecte et la recherche.

Afin de répondre au fait social que les fumeurs de pipe disparaissent de la scène de la rue, le Pijpenkabinet a développé deux initiatives. Avec un cours de fumage de pipe, un groupe de fumeurs de pipe débutants est initié chaque mois aux astuces de la dégustation d'une pipe. Ce service unique semble répondre à un besoin, en particulier chez les jeunes jusqu'à 35 ans. L'Amsterdams Pijprokers Genootschap (Société des fumeurs de pipe d'Amsterdam) a également été fondée en 2000. En rendant visible l'aspect social et culturel du tabagisme à la pipe, la différence entre la dépendance à la cigarette et le plaisir de fumer une pipe a été démontrée et propagée.